Rwanda vs Congo RDC : pour tout comprendre (l’édito de Roland Kouakou)

Comme la plupart des conflits qui se déroulent en Afrique, les tensions actuelles entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda sont très peu médiatisées. On a l’impression que tout le monde s’en fout, et pourtant, c’est un conflit aux conséquences humanitaires importantes.
S’il y a une chose à retenir, c’est que l’hétérogénéité des territoires est un obstacle à la cohésion nationale et même la formation d’une nation ; en d’autres termes, les pays ayant plusieurs ethnies, sans culture et histoire commune, sont susceptibles d’avoir plus de conflits à l’avenir.

Je propose une explication en quelques points de cette guerre de voisins :

L’une des causes primaires de la majorité des conflits en Afrique reste la question des frontières. Les décisions de la triste conférence de Brazzaville continuent d’avoir des conséquences fâcheuses sur la cohésion des peuples en Afrique.
Avant la colonisation la partie Est de l’Afrique, comme dans bien d’autres régions, était organisée en royaume, suivant une répartition ethnique des communautés. Ainsi, les Hutus et les Tutsis étaient répartis sur une espace allant du Rwanda actuel, jusque dans la région Est du Congo, le Kivu. Lors de la conférence de Berlin, le découpage des frontières modifie la configuration de la région, séparant ainsi ces deux groupes ethniques de telle façon que dans la partie rwandaise, l’on retrouve une majorité Hutus et une minorité Tutsi.
Les tensions vont ainsi s’accroître entre ces deux groupes ethniques ; les Hutus majoritaires occupaient l’essentiel des postes de gestion du pouvoir, les Tutsis se sentaient marginalisés et discriminés. Ces tensions provoquent un afflux massif de la minorité tutsis vers la région Est du Congo. Ils seront accueillis et dès l’accession à l’indépendance en 1960, le président Mobutu Sesse Seko signe un décret pour naturaliser l’ensemble de cette population tutsi, ils sont toutefois qualifiés de « congolais rwandophones » en raison de leur ethnie, le Kinyarwanda. Leur naturalisation est abrogée en 1981, car contestée par les populations locales.
Pendant ce temps, la rébellion du Front Populaire Rwandais, dirigée par l’actuelle président Paul Kagamé, parvient au terme de la guerre génocidaire, à vaincre militairement, les Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR), rebelles de l’ancien régime Hutu dirigé par Juvénal Habyarimana.
La minorité Tutsi, ainsi parvenu au pouvoir au Rwanda, s’emploie à défendre les autres tutsi « persécutés et discriminés » dans l’Est du Congo. De plus, le régime Tutsi accuse aussi le Congo de protéger des groupes rebelles des FLDR s’étant refugiés dans l’Est du Congo durant la guerre génocidaire. Ce qu’il considère comme une menace pour la stabilité du Rwanda, à l’image de la Russie se sentant menacée par la présence de l’OTAN en Ukraine.
À son tour, le Congo accuse son voisin Rwandais d’avoir soutenu en hommes et en armes la rébellion du M23 au Congo, groupe rebelle Congolais. À tout cela s’ajoute l’enjeu stratégique du contrôle des ressources minières dans l’Est du Congo. Toutes ces raisons contribuent à fragiliser cette région, avec une absence des services de l’Etat et une prolifération des groupes armés pour contrôler les mines et pouvoir se financer.
On pourrait ainsi dire que ce conflit est dû à des raisons socio-démographiques, la présence de divers groupes rebelles et le contrôle des matières premières du sous-sol de cette région.
Roland KOUAKOU, Consultant en Stratégies de communication politique et institutionnelle