Les corps de Thomas Sankara et ses 12 compagnons réinhumés à Ouagadougou

Ce jeudi 23 février à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, les dépouilles de Thomas Sankara et de ses douze compagnons tués le 15 octobre 1987 lors d'un putsch ont été réinhumés. Si plusieurs responsables du gouvernement étaient présents, la famille Sankara et quelques autres familles ont brillé par leur absence.
La cérémonie d’inhumation s’est déroulée en présence du Premier ministre Apollinaire Joachimson Kyélem de Tambela et d’une centaine de membres des familles venus se recueillir auprès des treize cercueils au Conseil de l’Entente, lieu de leur mort. Il y figure également depuis 2019 une statue à l’effigie du père de la révolution. Sur place, les treize cercueils étaient recouverts du drapeau du Burkina Faso. Mais la cérémonie religieuse, traditionnelle et militaire a été interdite au public.
<< C’est une journée historique, un moment solennel… Ils ont été tués mais ils n’ont pas tué la vision, il n’ont pas éteint la mission >>, avait déclaré hier mercredi l’aumônier civil après la bénédiction des corps. << Nous sommes contents que nos martyrs reposent enfin en paix avec une sépulture correcte car ça fait huit ans que leurs âmes erraient. Les familles vont pouvoir faire leur deuil >>, a indiqué le représentant des 13 familles, Joseph Saba.
Pour Me Benewende Sankara, avocat de la famille Sankara, cette cérémonie marque << le couronnement d’une quête de justice pour Thomas Sankara et tous les suppliciés du 15 octobre 1987 >>. Mais pour Blandine Sankara, c’est une douleur. << Enfermer les âmes de nos défunts dans le sang, dans cette douleur-là, sur les lieux où ils sont tombés, c’est nous obliger à aller marcher dans le sang de nos proches pour notre recueillement >>.
Pourtant, Valentin, le frère de Thomas Sankara était présent à la cérémonie au Conseil de l’Entente mais selon Blandine, il est venu à titre personnel. << Ils essaient de diviser treize familles. Je ne sais pas si ce sont les autorités. Mais, en tout cas, c’est un fonds de commerce. Il y a aujourd’hui comme de la récupération du nom, de la mémoire de Thomas >>, assure la sœur de l’ex président.
<< Pour nous, c’est un non-événement. Ce n’est qu’un cirque. D’ailleurs, la même chose qu’ils ont fait avec notre famille, cette tentative de division, ils l’ont fait avec d’autres familles. En tout cas, depuis la fin du procès [des assassins de Thomas Sankara, le 6 avril 2022, Ndlr], il y a tout de suite eu des réunions. On échangeait et on était sur la même longueur d’ondes : à savoir pas de Conseil de l’Entente, pas sur les lieux où ils sont tombés. On ne peut pas marcher sur les traces, dans le sang, pour un recueillement de nos proches >>, explique t-elle chez RFI.
Malgré leur indignation, le gouvernement prévoit une <<cérémonie nationale et internationale d’hommage aux victimes le 15 octobre 2023, pour honorer leurs mémoires >>.