Journée du 8 mars : qu’en est-il du droit des femmes en Afrique ?

Le 8 mars est la journée internationale des droits des femmes. En Afrique, c'est l'heure du bilan et des perspectives en vue pour un accès plus égalitaire des hommes et femmes au même droit en Afrique.
De gauche à droite : Mafoudia Bangoura et Laëtitia Mebaley

La population féminine africaine est souvent en marge des politiques nationales. Malgré la prise de conscience des populations, le chemin à parcourir reste tumultueux. Cet article est un voyage à travers le continent où nous avons échangé avec des femmes et celles qui font les villes. Deux principaux regards dont celui de Laëtitia Mebaley, fonctionnaire gabonaise et Mafoudia Bangoura, journaliste guinéenne.

Trois boucliers de protection pour les gabonnaises

En mars dernier, le gouvernement gabonais adoptait trois propositions de lois pour améliorer les droits des femmes. Ce sont essentiellement « l’élimination des violences faites aux femmes, la modification et la suppression de certaines dispositions du code civil notamment l’obligation d’obéissance de la femme et une large ouverture du droit d’interruption volontaire de grossesse (IVG) de sorte que l’état de détresse des femmes n’aurait plus besoin d’être qualifié de grave ».

Des plateformes de « lobbying » pour plus de droits

L’état des lieux c’est aussi la formation de plusieurs plateformes de femmes pour unir les forces et impacter les pouvoirs. En Afrique de l’ouest par exemple, des femmes se sont mises en réseau pour revendiquer l’accès égalitaire aux postes de responsabilités. C’est le cas du groupe de réflexion et d’influence des femmes (GRIF). Des initiatives similaires voient le jour dans certains pays notamment le mouvement des 52%, le hashtag #PasSansElles

Sur le plan administratif, des ministères ont été créés ou renommés pour participer à l’amélioration des droits des femmes. En Côte d’Ivoire, c’est le ministère de la femme, de la famille et de l’enfant, le ministère de la promotion féminine, de l’enfance et des personnes vulnérables en Guinée, le ministère des affaires sociales et des droits de la femme au Gabon, le ministère de la femme, de la famille du genre et de la protection des enfants au Sénégal… Dans chacune des nominations de ces institutions, une place est accordée aux femmes. Mais qu’en est-il de la réalité ?

« Au Gabon, il y a une stratégie appelée Gabon-égalité qui a été rendue public depuis 2020 qui est entrain de poser des actions fortes » dit Laëtitia Mebaley, conseillère communication au ministère des sports, de la jeunesse chargé de la vie associative. Mais ces efforts ne cachent pas les disparités visibles et elle affirme qu’en plus des autorités, « la société civile se bat pour que cette parité puisse être effective ».

Mafoudia Bangoura, journaliste chez Hadafo Médias en Guinée pense que « les femmes sont très présentes aujourd’hui dans les médias », mais le seul bémol se situe au niveau des postes qu’elles occupent dans cet univers. Pas très « satisfaite » car « elles sont plutôt des présentatrices des éditions d’information. Honnêtement pour la plupart avec peu d’efforts parce que souvent c’est la rédaction qui prépare les éditions et elles deviennent de simples lectrices, c’est quelque chose qu’il faut changer. Il faut qu’aujourd’hui dans les médias, les femmes aient l’ambition d’occuper des postes de responsabilité ». Par ailleurs la réorientation du discours est nécessaire pour un résultat efficient.

Changer de paradigme de communication

Une nouvelle dynamique apparait dans le cadre de la communication sur les droits des femmes en Afrique. Si avant, les messages étaient exclusivement orientés à l’endroit des femmes, désormais, il faudra un peu plus. C’est ce que pense Laëtitia Mebaley « le coeur de cible c’est les hommes. Il faut orienter notre combat d’abord vers les hommes pour savoir comment leur présenter la question des droits des femmes. Comment voulez-vous que la société change si nous allons sensibiliser essentiellement la femmes sur les questions des droits humains sans inviter les hommes à prendre part ? ». Un message qui résonne comme un écho en Guinée où Mafoudia Bangoura appelle à une adaptation des discours aux réalités des femmes africaines. L’heure n’est pas au rejet mais à l’inclusion « nous sommes dans la vie professionnelle, on ne va pas nous bloquer parce que nous sommes des femmes. Nous assumons le fait qu’on soit avec les règles douloureuses, qu’une fois mariées qu’on ait la maternité à assumer. Comme la société africaine voudrait qu’on ait plus de temps pour la famille, il faudrait aussi que les hommes l’acceptent. Si on a des maternités, qu’on se dise déjà que c’est une réalité. Il faut y penser et trouver des solutions et ne pas se servir de cela pour nous refuser d’avoir des postes » dénonce-t-elle.

Des perspectives pour l’amélioration des droits des femmes ?

Même si le tableau parait encore sombre, Laëtitia affirme qu’« il y a eu de grandes avancées continentales » même si elle reconnait que l’atteinte des objectifs égalitaires entre les humains reste un « processus qui peut paraitre long et lent, mais il y a réellement une prise de conscience ». Mafoudia ajoute que « les femmes sont entrain de sortir de ce carcan dans lequel on les met souvent. Il y a une certaine ouverture et les femmes sont entrain de rêver grand »

À rappeler que malgré ces efforts, la représentativité des femmes au niveau des postes de prise de décision reste très bas dans la majorité des pays africains. L’Afrique n’a connu que douze présidentes dont sept par intérim.